Campagne 2018 : des Ensmatiques en apesanteur !

Quelle joie en janvier 2018 lorsque le CNES a annoncé que notre candidature au concours étudiant « projet parabole » avait été retenue parmi une vingtaine de projets. Notre équipe, composée de 6 étudiants ISAE-ENSMA et 2 enseignants-chercheurs de l’équipe de thermique (COST) de l’Institut Pprime, s’est de suite mise au travail.

But scientifique du « projet parabole »

Notre projet était d’observer et de comprendre la dynamique d’un panache de convection naturelle d’eau se développant autour d’un cylindre chauffé lorsque la pesanteur varie en fonction du temps. Les applications concernent le contrôle thermique de l’habitat spatial où il est impossible de garder les astronautes au chaud avec des radiateurs classiques, et en particulier lors des accélérations ou freinage, lorsque la pesanteur équivalente varie.

Qu’est-ce qu’un vol 0G ?

La variation en fonction du temps de la pesanteur g est la spécificité des vols paraboliques ou vols 0G. Ces vols sont réalisés par la société NOVESPACE dans un Airbus A310 spécialement équipé. Un vol parabolique consiste, pour le pilote, à réaliser une trajectoire elliptique dont la terre serait le foyer. De cette manière, telle une pierre que l’on jette dans les airs, les expérimentateurs, dans l’avion, ne sont plus retenus par le sol et sont alors soumis à la chute libre, on parle alors de micropesanteur ou 0G. Au cours d’une campagne d’essai, le vol dure 3 h et comporte 31 paraboles. Nous avons pu vivre l’expérience unique de flotter dans l’air, le « free floating ».

Description et préparation de l’expérience

Pour les besoins de l’expérience, il a fallu concevoir et fabriquer une cuve remplie de 10L d’eau avec un cylindre de cuivre chauffé électriquement, positionné en son centre. Ce n’était pas une mince affaire, compte tenu des exigences de sécurités liées au vol parabolique : volume restreint du rack étanche mis à disposition par le CNES, étanchéité de la cuve, résistance mécanique à 11G si jamais l’avion s’écrase…, protection électrique contre un potentiel emballement thermique… Des défis qui ont été relevés grâce à l’aide des techniciens experts de l’institut Pprime et de l’ISAE-ENSMA. Le mouvement convectif est généré par la différence de température entre l’eau et le cylindre chauffé. La température est mesurée ponctuellement par des thermocouples placés dans la cuve et sur le cylindre. Nous avons également développé une métrologie optique de température pour « observer » en temps réels la distribution de température de l’eau à l’intérieur de la cuve. C’est la B.O.S., ou « Background Oriented Schlieren ». Cette méthode consiste à mesurer des déviations de faisceau lumineux traversant la cuve, dont leurs origines sont les gradients d’indice de réfraction couplés aux gradients de températures. Nous avons pu ainsi observer l’évolution temporelle du panache thermique en fonction de la variation temporelle du terme source convectif, la gravité.

Installation sur place et vol

Après 6 mois de développement en liaison constante avec NOVESPACE, nous avons passé 10 jours dans leurs locaux, à Mérignac, afin d’installer l’expérience dans l’avion et d’effectuer la campagne d’essai en vol. C’était aussi l’occasion de rencontrer les autres équipes participantes à la campagne, des chercheurs et d’autres étudiants lauréats, mais également des « stars » telles que Jamy de l’émission « C’est pas sorcier » ou « Le monde de Jamy », Thomas Pesquet astronaute et devenu récemment pilote 0G pour NOVESPACE, ou encore des pilotes de la patrouille de France, participant en tant que sujets d’expériences en neurosciences…

 Trois étudiants ont pu effectuer le vol 0G : 3 heures, 31 paraboles, de quoi laisser d’inoubliables souvenirs ! La sensation de « free floatting » est unique. On se sent à la fois léger et désorienté. Les 22 secondes de micropesanteur passent très vite ! La phase « 0G » est précédée et suivie de transitions à 1.8G : mieux vaut ne pas avoir la tête en bas en fin de parabole ! Pour éviter aux expérimentateurs de se sentir mal, nous avons reçu une injection de scopolamine, substance recommandée contre le mal de transports. On notera également un effet secondaire euphorisant. Malgré tout, de nombreux sachets ont été utilisés pendant le vol.

Et après ?

Cette belle aventure ne s’est pas arrêtée là puisque les données recueillies ont été dépouillées et analysées. Les premiers résultats sont très encourageants puisqu’un article a déjà été soumis et accepté au congrès annuel de la Société Française de Thermique. Il est envisagé également de mettre en place un TP de troisième année à l’ISAE-ENSMA autour de l’expérience et de poursuivre l’analyse des résultats par un stagiaire…

Remerciements

Nous remercions le CNES de nous avoir permis de mener ce projet extraordinaire ainsi que l’ISAE-ENSMA et la mairie de Chasseneuil-du-Poitou qui nous a soutenus financièrement. Vous trouverez des photos, vidéos et autres retours d’expériences sur notre page facebook « Projet parabole 2018 : l’EDPATS par l’ISAE-ENSMA ».

Membres étudiants : Aurélien Doriat, Cédric Schreck, Paul Rousseau, Baptiste Serres, Arthur Paqueton, Cyril Petitjean.

Partenaires du projet : Gildas Lalizel, Florian Moreau, Hervé Arlaud, Laurence Chocinski, Thierry Degeay, Jean Christophe Fraudeau, Jean-Marie Petit, André Piteau et Thomas Villate (NOVESPACE).

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